Monday, August 22, 2011

Le Canada bien décidé à ne pas perdre son Grand Nord


Crédits photo:Patrick Kelley.

INFOGRAPHIE - Ottawa a engagé une vaste opération militaire en Arctique, nouvelle terre promise. 

Alors que le réchauffement climatique rend les richesses du Grand Nord de plus en plus accessibles, le Canada se prépare à des conflits. Pour mieux y faire face, il vient de lancer la plus vaste mission militaire qu'il a menée jusqu'ici, dans l'Arctique, avec ses homologues américains et danois. Nom de code «Nanook 11».

Les exercices pour défendre la souveraineté d'Ottawa dans le Grand Nord se dérouleront jusqu'à la fin août dans les détroits de Lancaster et de Davis, dans la baie de Baffin et sur l'île de Cornwallis. Si les effectifs déployés par le ministère de la Défense, 1100 hommes des trois armes, demeurent modestes, à l'échelle des moyens du Canada, le pays se prépare activement à des interventions dans le Nord. Ottawa a récemment augmenté les effectifs de ses rangers inuits chargés de défendre la région arctique et modernisé leurs équipements.

Le déploiement de troupes dans l'Arctique, avec la participation de forces alliées, est un message à destination de la Russie, le principal concurrent du Canada dans la région. «Le Nord, c'est à nous. On veut démontrer à nos partenaires internationaux (…) que nous sommes présents. C'est notre but», a confié le capitaine de corvette Luc Tremblay, à Radio-Canada.

Permis d'exploration pétrolière 

La Russie a annoncé vouloir élargir ses frontières arctiques en déposant à l'ONU en 2012 une demande d'extension de son plateau continental. Au début de son premier mandat, en 2006, le premier ministre conservateur, Stephen Harper, ne jurait que par le développement de la composante militaire dans le Grand Nord. Désormais, Ottawa cherche des alliés et multiplie les missions scientifiques et de relations publiques pour montrer au monde que l'Arctique est canadien.

Avec le titre d'ambassadeur de France chargé des négociations internationales relatives aux pôles Arctique et Antarctique, Michel Rocard, a ainsi participé la semaine dernière à un voyage sur le brise-glace québécois Admundsen. Le réchauffement climatique favorise les déplacements des navires dans l'Arctique. En juillet, la banquise a atteint, selon le US National Snow and Ice Data Center, un seuil minimum record pour un mois de juillet, à tout le moins depuis l'existence des premières mesures satellites sur le sujet en 1979. Dès lors, la guerre est déclarée pour le contrôle du pétrole, du gaz naturel et des immenses ressources halieutiques dans l'Arctique.


Le crabe des neiges pourrait bientôt avoir goût de pétrole. Le ministère des Affaires autochtones et du Nord a accordé des licences d'exploration aux compagnies pétrolières Husky Energy, ConocoPhilips, Imperial Oil, MGM Energy et Shell en mer de Beaufort et dans le Grand Nord canadien. L'Arctique est la nouvelle terre promise des compagnies pétrolières.

«Ces territoires représentent un intérêt stratégique pour nous», a confirmé récemment la porte-parole de Husky Energy, Colleen McConnell. Les ressources de pétrole et de gaz de l'Arctique représenteraient environ un cinquième des réserves d'hydrocarbures non découvertes de la planète. Le gouvernement conservateur a écarté tout moratoire d'exploration pétrolière dans le Grand Nord.

L'an dernier, peu après la catastrophe écologique de BP, Stephen Harper s'était fait rassurant. «La réglementation est très stricte au Canada», avait certifié le chef du gouvernement. Ce que contestent à peu près tous les groupes écologistes. Dans l'un de ses documents sur l'Arctique, le World Wildlife Fund Canada déplore: «Notre réglementation est trop laxiste… Aucune technique n'a encore été mise au point pour nettoyer le pétrole dans les eaux couvertes de glace.»

Plus difficile que l'Afghanistan 

Un rapport publié début août par l'Office de l'énergie du Canada révèle qu'en cas de catastrophe pétrolière les opérations de nettoyage ne pourraient pas se dérouler un jour sur cinq si une marée noire avait lieu en juillet et quatre jours sur cinq si celle-ci avait lieu en octobre, en raison des conditions climatiques extrêmes. Les militaires canadiens semblent donner raison aux écologistes. Le capitaine Tremblay ne reconnaît-il pas lui-même? «C'est un environnement extrêmement difficile. L'Arctique est parfois plus difficile que l'Afghanistan. Notre plus gros problème est la logistique, mais aussi de savoir combien de temps nous pouvons travailler dans le froid.»

Source - Radio Canada